Les Maisons asbl parle de maisons de détention lorsque trois piliers sont respectés : la petite échelle, la différenciation et l’ancrage dans la communauté. Ces trois principes sont intrinsèquement liés et se renforcent mutuellement. Lorsqu'un grand nombre de petites maisons de détention sont intégrées dans la communauté et diffèrent les unes des autres sur de nombreux plans, elles peuvent offrir un contexte approprié pour chaque individu. Par conséquent, cette diversité de maisons de détention permet de remplacer les prisons classiques actuelles.
Petite échelle
La petite échelle permet de mettre en place une approche personnalisée au sein de la maison. L'accent est mis sur la communication directe, un fonctionnement plus transparent et la possibilité pour tous les résidents de participer. Ces aspects sont aujourd'hui fortement entravés par nos prisons classiques, qu'elles soient anciennes ou récentes et de grande taille.
En petits groupes, il est possible de construire une communauté saine au sein de la maison tout en garantissant à chaque individu une occupation quotidienne significative. Les résidents de la maison de détention prennent la responsabilité des tâches quotidiennes et apprennent à gérer les tensions liées à la vie en collectivité. Étant donné que les maisons de détention sont beaucoup plus petites et organisées de manière moins bureaucratique que les prisons (moins de règles et de procédures), tous les participants sont amenés à interagir les uns avec les autres. Cela permet d'établir de meilleures relations entre les travailleurs, les personnes en détention et d'autres personnes. Cette approche sur mesure contribue à une sécurité dynamique, c'est-à-dire une sécurité qui émane des relations interpersonnelles plutôt que de détecteurs de métaux, de barreaux et d'autres mesures de sécurité. Ce mode de fonctionnement permet également d’élaborer des parcours de réintégration personnalisés. La petite échelle favorise ainsi la reconnexion des personnes détenues : entre elles, avec le personnel, avec leurs proches et avec la société au sens large.
La petite échelle est, comme mentionné précédemment, liée à la différenciation, ainsi qu'à l’ancrage dans la communauté. Les besoins du groupe cible déterminent le nombre maximum de participants. Il est important que les résidents d'une maison de détention soient hébergés ensemble en fonction de leurs besoins, plutôt qu'en fonction de certains délits ou critères de sélection. De cette manière, il est possible de travailler avec un groupe sur des besoins d’accompagnement, dans une approche basée sur leurs forces et individualisée. Par ailleurs, une citation de Sabrina Puddu, architecte et chercheuse à la KU Leuven, apporte un éclairage sur ce que la petite échelle pourrait signifier :
"Intuitivement, je dirais que le bon nombre de personnes est celui qui permet à tous les membres de s'asseoir autour d'une table. Pas nécessairement une table intime comme celle d'une famille, mais une grande table où ils peuvent manger ensemble, discuter et prendre des décisions qui affectent leur vie commune. Mais alors ma question serait : les membres d'une maison de détention incluent-ils uniquement les détenus, ou également le personnel?"
Différenciation
Étant donné que plusieurs petites maisons de détention doivent coexister, elles peuvent offrir un hébergement adapté à chaque individu. C’est ce que signifie la différenciation : placer les personnes dans le contexte le plus approprié en fonction de leurs besoins et de leurs circonstances. La différenciation est donc possible sur plusieurs plans : au niveau du groupe cible, de l’organisation quotidienne, de l’accompagnement et des soins, mais aussi en ce qui concerne la sécurité de sécurité.
Comme mentionné dans le point précédent consacré au pilier qu’est la "petite échelle", le contexte d'une maison de détention permet une organisation quotidienne individuelle et significative, ainsi qu’un accompagnement et des soins adaptés. Différents services, activités et programmes peuvent être proposés en fonction des besoins des résidents. De plus, les différentes maisons de détention offrent la possibilité d’adapter le niveau de sécurité à chaque individu. Les niveaux élevés de sécurité, caractéristiques des grandes prisons, ne sont nécessaires que pour un très petit nombre de personnes. Pour la majorité des personnes détenues, un niveau de sécurité élevé est inutile et cause de nombreux dommages liés à la détention. En outre, une installation à faible sécurité est moins coûteuse à rénover, construire et gérer qu'une installation à haute sécurité. Dans le même temps, il est inévitablement plus difficile de se préparer à la réintégration dans une structure fortement sécurisée. L’incarcération dans des maisons différenciées constitue une solution plus durable, qui facilitera également le processus de réinsertion afin de faire des (ex) personnes détenues des membre précieux de la société - à la fois pour la personne incarcérée et pour la société elle-même. Le contexte actuel entraîne, au contraire, une récidive. Les problématiques personnelles peuvent être mieux prises en charge dans une petite structure, ce qui réduit les risques de nuire à la société sur le long terme.
L'asbl The Houses a affiné son concept en rédigeant des notes de recommandation pour différents groupes cibles dans les maisons de détention : les condamnés en fin de peine, les jeunes adultes âgés de 18 à 25 ans, les mères avec enfants, les personnes en situation de vulnerabilité psychique et les personnes âgées en détention.
Ancrage dans la communauté – travail communautaire
Dans une perspective de justice restaurative, les maisons de détention peuvent jouer un rôle économique, social ou culturel dans leur environnement immédiat. Ainsi, l’énergie, la force et les compétences des personnes détenues peuvent être mobilisées. Les personnes incarcérées ont la possibilité d'assumer leurs responsabilités et de rendre quelque chose à la société.
Les maisons de détention ne sont pas isolées de la société, mais interagissent de manière dynamique avec la communauté. Les personnes en maison de détention utilisent les services disponibles dans la communauté, ce qui facilite leur réinsertion car elles sont déjà familiarisées avec les aides et services à leur disposition. Cela crée également un engagement et une responsabilité réciproques. Les maisons de détention collaborent, par exemple, avec des travailleurs sociaux locaux, des médecins, des enseignants et des entraîneurs sportifs, mais aussi avec les autorités locales, les municipalités et des bénévoles de la communauté. Ainsi, les personnes en maison de détention bénéficient des mêmes prestataires de services (enseignants, psychologues, formateurs, coachs, etc.) que tout le monde dans le quartier.
Dans les maisons de détention à faible sécurité, les résidents peuvent sortir pour rencontrer leurs prestataires de services. Cela leur permet de connaître les prestataires de services qui pourront continuer à les accompagner après leur libération. Pour les maisons de détention à haute sécurité, une approche différente peut être adoptée, les prestataires de services venant directement dans la maison de détention pour y offrir leurs services.
Les maisons de détention peuvent également apporter une valeur ajoutée à leur quartier de nombreuses manières. Pensez à des projets tels qu'un restaurant social, un supermarché, un atelier de réparation ou la vente de légumes cultivés sur place. Ces initiatives permettent aux personnes incarcérées de participer à des activités qui ont du sens, à la fois pour la société et pour elles-mêmes. Elles donnent également aux personnes détenues l’occasion de réparer les torts causés par leurs crimes, que ce soit de manière symbolique ou financière. Même dans une maison de détention fortement sécurisée, une valeur ajoutée peut être créée grâce à l’utilisation partagée des espaces du centre de détention. Pourquoi ne pas permettre à une organisation locale, comme une école d’art, de se réunir dans la salle de visite du centre de détention lorsque celle-ci n’est pas utilisée ? Ce type d’initiative permet aux communautés locales de s’habituer à la présence d’anciens délinquants parmi eux. Grâce à une préparation minutieuse et à un dialogue continu avec le quartier, les maisons de détention intégrées à la communauté contribueront à un sentiment général de justice, d’équité et de sécurité.